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Le bruit de fond : nouvel atout des sismologues

13 Mar 2005

Des chercheurs du CNRS (1) et de l’Université du Colorado ont cartographié le sous-sol californien à partir du bruit de fond enregistré par un réseau de stations sismologiques. Grâce à cette méthode, employée pour la première fois, ils ne sont plus obligés d’attendre les tremblements de terre pour connaître la réponse du sous-sol aux ondes sismiques et en faire des cartes. De plus, ils obtiennent une meilleure résolution spatiale. Ils ont ainsi délimité les bassins sédimentaires, qui sont des zones à risque, ou les massifs granitiques sur une profondeur de 20 kilomètres. Ce travail pourrait également s’appliquer à l’exploration pétrolière. Il est publié dans la revue Science du 11 mars.

Un tremblement de terre déclenche des ondes sismiques, qui se propagent dans le sol et le font bouger. Ces mouvements sont enregistrés par les stations sismologiques implantées dans la région. Or, la trajectoire et la vitesse des ondes dépendent de la nature du sous-sol. Les ondes rencontrent des obstacles qui les réfléchissent ou les diffractent, tels les massifs rocheux, ou qui les ralentissent, tels les bassins sédimentaires. En analysant ces ondes à leur arrivée aux diverses stations sismologiques, les géophysiciens en déduisent des informations sur la nature du sous-sol.

Ces informations servent à estimer les risques sismiques. Par exemple, on sait que les bassins sédimentaires sont les zones les plus à risque. Lors d’un séisme, leur surface tremble comme celle d’un flan (un solide élastique), détruisant les immeubles. Il est donc utile de connaître la nature du sous-sol. Mais jusqu’à présent, il fallait attendre un tremblement de terre pour obtenir ces informations, qui demeuraient partielles car elles dépendaient de la localisation du séisme.

Les chercheurs du CNRS (1) et de l’Université du Colorado ont utilisé le bruit de fond enregistré par les stations sismiques pour déterminer la nature du sous-sol. L’océan (vagues, courants) et l’atmosphère (dépressions, vents), en mouvement permanent, secouent très faiblement le continent. A Grenoble, où les chercheurs du CNRS sont installés, on ressent principalement le mauvais temps qui arrive sur la côte atlantique. Ce bruit de fond, considéré auparavant comme inutile, semble venir de partout à la fois. Les géophysiciens ont travaillé sur les enregistrements du bruit de fond de 62 stations, au sud de la Californie, pendant un mois. Ce réseau homogène (une station tous les 50 kilomètres environ) préfigure les grands déploiements de stations qui devraient équiper les zones sismiques dans le futur.

Les chercheurs ont démontré qu’à partir du bruit enregistré par deux stations A et B, on peut, par un traitement mathématique, en déduire la réponse sismique que l’on aurait enregistré en A s’il y avait eu un tremblement de terre en B. Ils ont ainsi considéré tous les couples de stations possibles et en ont déduit la réponse sismique du sous-sol comme s’il y avait eu un tremblement de terre à chaque station. Ces données sont plus complètes que celles qu’ils auraient obtenu au fil des décennies, car les tremblements de terre ne sont jamais répartis de façon homogène sur le territoire. Ils ont ainsi cartographié toute la région, avec une résolution spatiale bien supérieure à celle obtenue par enregistrement des séismes et sur une profondeur de 20 kilomètres (voir la figure). Selon Richard Weaver, de l’Université de l’Illinois, cette nouvelle méthode de cartographie du sous-sol pourrait aussi servir à l’exploration pétrolière.

 

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Sur cette carte du sous-sol sud-californien, à une profondeur de 20 kilomètres de la surface, on distingue le bassin sédimentaire de la vallée de Sacramento (en rouge, au sud de San Fransisco) et le massif granitique de la Sierra Nevada (zone bleue en haut). Du rouge au bleu, l’échelle de couleur représente la vitesse croissante des ondes sismiques.

    

Notes :
(1) du Laboratoire de géophysique interne et tectonophysique, à Grenoble.

Références :
High-resolution surface-wave tomography from ambient seismic noise, Science, 11 mars 2005, Nikolai M. Shapiro, Michel Campillo, Laurent Stehly, Michael H. Ritzwoller

Contacts :
Contact chercheur :
Michel Campillo, Tél : 04 76 82 80 36, Mél : [email protected]

Contact presse :
Claire Le Poulennec
Tél : 01 44 96 49 88, Mél : [email protected]

Contact département des Sciences de l’Univers :
Christiane Grappin
Tél : 01 44 96 43 37, Mél : [email protected]

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