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CNRS : Deux millions d’années de variations du champ magnétique terrestre

11 Juin 2005

Pour tenter d’éclaircir le mystère non résolu de l’origine des inversions du champ magnétique terrestre, des chercheurs de l’Institut de physique du globe de Paris (CNRS – Université de Paris 7) (1)et du Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement (CNRS-CEA) ont étudié la variation de l’intensité du champ magnétique dipolaire au cours des deux derniers millions d’années. Ils ont analysé des sédiments provenant de différents bassins océaniques répartis autour du globe. Les résultats, publiés dans la revue Nature du 9 juin, révèlent de nouvelles propriétés du champ magnétique associées aux inversions.

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Le champ magnétique terrestre, que l’on assimile à un dipôle à la surface de la Terre (dont les pôles attirent la pointe aimantée de la boussole), ne cesse de varier au cours du temps au point de pouvoir s’inverser fréquemment à l’échelle des temps géologiques : le pôle nord passant au sud et réciproquement. Cette particularité bien connue en géologie a permis d’établir une échelle de temps utilisée pour dater les roches. L’origine et les mécanismes associés à ces inversions restent à éclaircir. On sait que le champ magnétique est induit par des courants animant l’alliage de fer et de nickel en fusion qui constitue la partie liquide du noyau de la Terre.

C’est ce que l’on appelle la dynamo terrestre. On pense que si le champ varie à la surface de la Terre, c’est vraisemblablement que les courants du noyau liquide, situé à plus de 2900 km de profondeur, ne sont pas stables. Que se passe-t-il dans le noyau qui provoque une inversion du champ magnétique ? On ne le sait pas encore. Pour tenter d’élucider ce mystère qui mobilise les spécialistes de tous pays depuis des décennies, deux voies complémentaires sont possibles : la modélisation numérique ou expérimentale et l’analyse précise des variations du champ magnétique au cours du temps.

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C’est cette dernière voie qu’ont choisie Jean-Pierre Valet et ses deux collègues Laure Meynadier et Yohan Guyodo depuis plusieurs années. Ils ont analysé finement les variations du champ magnétique enregistrées par l’aimantation des sédiments marins provenant de différents bassins océaniques répartis autour du globe. Pour la première fois, ils viennent de reconstituer l’évolution de l’intensité du champ dipolaire à l’échelle globale au cours des deux derniers millions d’années. Cette intensité fluctue considérablement au cours du temps, même entre deux inversions quand le dipôle est considéré comme étant stable. Les chercheurs ont observé différentes périodes correspondant à des intensités moyennes  du dipôle sensiblement différentes. Ils montrent que plus cette intensité moyenne est faible, plus la fréquence des inversions est grande : en effet, pendant ces périodes de faible intensité moyenne le champ continue à fluctuer avec la même amplitude. Il atteint donc d’autant plus fréquemment des valeurs très faibles. C’est alors que des instabilités importantes peuvent aboutir à un renversement du pôle. Au cours de ces deux millions d’années plusieurs inversions se sont produites. Pour chacune d’elles les chercheurs ont constaté un comportement systématique : l’intensité diminue régulièrement avant chaque inversion pendant 60 à 80 mille ans, puis augmente très rapidement lorsque le renversement est achevé. Cette dissymétrie témoigne de mécanismes différents qui restent à comprendre lors de ces phases de dégradation et de régénération du champ.

Notes :
1) Laboratoire de géomagnétisme, paléomagnétisme et géophysique de surface et Laboratoire de physique et chimie des interactions géologiques (CNRS IPGP UP7)

Références :
Geomagnetic dipole strength and reversal rate over the past two millions years
Nature, 9 juin 2005
Jean-Pierre Valet (1), Laure Meynadier (2), Yohan Guyomo (3)
1-Géomagnétisme et paléomatgnétisme (CNRS-IPGP-UP7)
2- Géochimie et cosmochimie (CNRS-IPGP-UP7)
3- Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement (CEA-CNRS)

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Contacts :
Contact chercheur
Jean-Pierre Valet, tél 01 44 27 35 66, [email protected]

Contact INSU- CNRS
Christiane Grappin – tél 01-44-96-43-37, [email protected]

Contact presse
Martine Hasler tél : 01 44 96 46 35, [email protected]

Ces observations sont précieuses pour les modélisateurs qui doivent les confronter aux résultats des modélisations numériques de la dynamo terrestre et parvenir à comprendre les mécanismes des inversions.

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Figure 1 : Courbe de l’évolution de la paléointensité. L’intensité du champ est très fluctuante. Elle est en moyenne plus forte pendant la période Brunhes que pendant la période Matuyama.
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Figure 2 : Variations de l’intensité avant et après chacune des cinq inversions qui se sont produites lors des 2 derniers millions d’années. Les variations du moment dipolaire qui se produisent durant les 80 et les 20 milliers d’années qui précèdent et suivent chaque inversion ont été superposées (chaque courbe correspond à une inversion). On remarque que dans chaque cas une longue décroissance précède l’inversion tandis qu’un regain rapide et important se produit après.

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