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Discours de rentrée de Madame Marie-Georges Buffet

29 Août 2005

Discours prononcé par Marie-George Buffet, Secrétaire nationale du PCF.

26 août 2005 – Plage de Corbières – Marseille – Je voudrais dabord vous dire tout simplement mon bonheur dêtre ici parmi vous dans ce quartier et cette ville de Marseille. Les journalistes me posaient déjà la question « Mais pourquoi faire cette rentrée ici ? ».

Jai plusieurs raisons : peut-être le fait que dans cette ville on ne conjugue pas injustices et inégalités avec résignations et repli sur soi. Dans cette ville, on conjugue injustices et inégalités avec colère, luttes, et solidarité. Je suis frappée à chaque fois quil y a de grandes manifestations régionales de voir comment Marseille est lune des villes où les manifestations sont les plus fortes. La deuxième chose cest peut être, quà chaque fois que je suis passée à Marseille jai rencontré des hommes et des femmes qui avait une dignité dans leurs combats et je voudrais ici évoquer, et vous saluer à travers eux, quelques un dentre eux. dabord peut-être un clin doeil aux jeunes des quartiers nord de Marseille avec qui jai beaucoup travaillé lorsque jétais ministre de la jeunesse et qui faisaient un travail extraordinaire dans ce quartier pour faire en sorte justement que ces jeunes trouvent un moyen pour vivre bien. Egalement le Mouvement des Chômeurs que jai eu loccasion daccompagner devant lAssedic à ces femmes qui animent ce mouvement, aux marins de la SNCM qui mont aujourdhui encore remis un dossier et nous allons prendre une initiative avec Frédéric Dutoit et Michel Vaxès à lAssemblée nationale pour accompagner leur combat et enfin, dernier clin doeil et jirai les voir demain, dans leur entreprise, aux salariés de Nestlé qui grâce à leur lutte remarquable pour défendre non seulement leur emploi mais leur entreprise ont encore marqué un coup fort en cette fin du mois daoût, puisque de nouveau le tribunal a rendu justice, La direction doit remettre cette entreprise en marche.

Autre raison de ma venue ici, cest cette capacité que vous avez eu tous et toutes ensemble à mobiliser les hommes et les femmes de cette ville sur le « non » au projet de traité constitutionnel, à cette camisole libérale. Souvenez-vous des commentaires qui ont suivi, « les grandes villes ont vote oui », et bien Marseille est une belle exception et elle rejoint Lille, et ce nest pas un hasard parce que se sont vraiment des villes ouvrières.

 

Alors cest pour ça que je suis venue ici parce que quelque part vous allez donner le ton à la rentrée du Parti communiste français. Alors bien sûr on parle de rentrée, mais il ny a eu aucune trêve estivale dans laction face aux mauvais coups du gouvernement. Nous avons continué à faire signer la pétition pour que votre vote du 29 mai soit respecté, pour que la France et son Président de la République retire la signature de notre pays du projet de traité constitutionnel, pour que la France sexprime pour larrêt de lagenda de Lisbonne et des différentes directives qui arrivent, la fameuse directive Bolkenstein, celle sur le temps de travail, celle qui vise encore à mettre en concurrence un peu plus les transports. On le voit en ce moment avec la fermeture des lignes Corail par la SNCF. Nous allons atteindre ce million de signatures pour faire en sorte que vous soyez entendu. Et puis des initiatives contre ce déni de démocratie que constituent les ordonnances contre le code de travail par le gouvernement Villepin, des ordonnances qui installe la précarité, qui détruisent ce qui fondait le contrat de travail c’est-à-dire la possibilité pour un individu davoir un emploi stable puisquen fait on instaure une sorte de permanence de lessai. A tout moment, un patron, pourra décider de licencier un salarié. Vous vous rendez-compte des conséquences, de cette menace permanente, cest une façon de leur dire vous navez plus quà vous taire et à subir lexploitation telle que nous avons décidé de vous limposer.

Et puis mobilisation en soutien aux salariés, jai évoqué bien sûr Nestlé mais quand même pensons à la lutte de ses ouvriers polonais à Saint Nazaire. Rappelez-vous ceux qui pendant la campagne du référendum nous donnaient des leçons en nous disant « mais il faut être solidaire des salariés polonais », rappelez-vous de ce fameux commissaire Bolkensten se moquant des plombiers français évoquant les plombiers polonais Mais là, on ne les a pas entendus, pas un geste du gouvernement, rien pour faire en sorte que ces ouvriers aient leur dû. Leur lutte et la solidarité des salariés français, et je crois que le non que nous avons porté cétait ce non de solidarité, a permis que ces ouvriers reçoivent enfin leur salaire. Et puis solidarité aussi avec ces hommes et ces femmes issus de limmigration quon a vus cet été rester dans des quartiers, on a vu lUnion européenne capable de se mettre daccord pour organiser, à plusieurs pays, des charters et qui serait incapable denvisager lUnion Européenne avec ne serait-ce que les garanties sociales partagées avec tous les salariés de ce pays.

 

Pas de trêve non plus dans le débat politique. Je ne parle pas des pages consacrées par Paris-Match aux vacances de Sarkozy ou au voyage de son épouse, je parle du véritable débat politique. Pas de trêve parce quon a vu en juillet non loin dici, à Arles, un débat rassembler les différentes sensibilités de gauche qui se sont prononcées pour le « non », parce quon a vu les collectifs du non se réunir au plan national et décider de poursuivre ensemble de ne surtout pas se séparer après la victoire du 29 mai pour construire une autre Europe mais aussi pour discuter de quelle politique on devrait mener en France. Il y a aussi les initiatives du Parti communiste de rencontres, de débats qui vont bien sûr prendre toute leur apogée lors de la fête de lhumanité qui va être une fête inégalée puisquau rendez-vous national nous avions déjà 4 000 vignettes supplémentaires vendues par rapport à lan dernier. Une fête de lhuma où lon va faire le tribunal des fameux 100 jours du Premier ministre Villepin, un tribunal qui va parcourir toutes les allées de la fête avec les salariés, les hommes et les femmes qui mènent le combat pour changer leur vie. Une fête qui sera aussi un lieu de rencontre, puisque dès le samedi matin nous avons invité toutes les forces de gauche à venir débattre sur le thème « quelles propositions, quel projet pour la gauche demain ? ».

Donc il ny a pas eu de trêve estivale mais nous sommes encore loin du compte, il faut aller plus vite, il faut aller plus fort il faut aller plus largement dans le rassemblement, nous avons besoin dune véritable contre-offensive populaire et citoyenne. Cest urgent parce que la droite va aller à marche forcée dans une nouvelle étape de sa politique. Cest possible. Ce que nous avons fait lors de la campagne du référendum, nous pouvons le refaire face à cette offensive libérale. Tout à lheure, vous me disiez, madame, que javais mené une belle campagne mais peut-être, justement, ce qui a fait la force de celles et ceux qui, à gauche, se sont engagés pour le « non », cest la mobilisation populaire, citoyenne, cest le fait que nous avons tous et toutes engagé ou non dans un parti, dans une association, dans un syndicat, nous avons tous et toutes été des militants et des militantes de ce « non » pour une autre Europe, une Europe de la paix, du progrès social et de la démocratie. Je veux croire que notre peuple à pris conscience quà travers ce projet de traité, quelque chose dirréversible était en train de se présenter et quil était temps débranler la pensée unique, quil était temps de ne plus accepter ce modèle quon veut nous imposer depuis maintenant plus de trente ans où au nom du profit immédiat on impose la précarisation le retrait des missions publiques des services publics, on impose la mise en concurrence et le tout marchand. Je crois que ce non a porté un retour aux exigences dégalité, de solidarité, de justice, un retour à lidée dintérêt général, de bien commun. Cest un « non » qui a été collectif. Je crois que ce vote est  un vote de classe. Lorsquon regarde comment les ouvriers, les employés, les professions intermédiaires se  sont rassemblés sur le non, et sest traduit le vote de ton quartier et de ta circonscription (ndrl 15e et 16e arrondissement de Marseille), et bien je crois que ce vote nous donne à penser que si le peuple prend les choses en main, les choses peuvent bouger. Il ny a aucune fatalité, on a gagné le 29 mai, demain on peut de nouveau gagner et chasser la droite durablement.

 

Cest une course de vitesse qui est engagée, la droite veut tenir jusquen 2007 et se prépare à une énorme forfaiture. Il y aurait une alternance dans la droite elle-même, une droite nouvelle apparaîtrait avec son leader Sarkozy. Mais quest ce quest cette droite nouvelle, en fait, cest la super exploitation, cette droite nouvelle cest une droite composée de liquidateurs, que ce soit en vers, ou à coup de karcher, leur objectif cest le même. Depuis des décennies dans ce pays, ils ont essayé à tout prix de nous imposer la logique capitaliste et une politique libérale, mais jusquà présent cela a cohabité avec le maintien des statuts, des garanties, des droits de lintérêt général, mais aujourdhui ils ont décidé de casser tout cela. Oui ce sont des liquidateurs de ce qui a fait la base de notre République, de ce qui a fait la base de notre société qui se sont construites par les luttes et par les lois. Cest ça, la droite nouvelle auquelle ils veulent nous faire croire, il y a une course de vitesse engagée entre cette alternance de casse sociale, de casse démocratique quils nous préparent et une gauche qui soit réellement une gauche avec un projet alternatif.

 

Il y en a assez de cette société où on nous demande de choisir entre exclusion et précarité, quand jai vu dans certains articles mettre en exergue des jeunes qui disaient « mais écouter cest, quant même pas si mal quon nous prenne à lessai pendant deux ans », cest à cela quon veut réduire notre peuple, et cest ça que la gauche doit refuser, cest à ça que la gauche doit sattaquer. On peut les mettre en échec durablement, je le pense profondément. Pour cela, il faut que nous retrouvions la même dynamique que nous avons eu au début de lannée. « Tous ensemble », cest le slogan que nous avons crié dans les meetings. Il faut que ce tous ensemble nous le retrouvions, dans les semaines et les mois à venir. « Tous ensemble » dans les luttes et je vous propose de tenir, en octobre, à linitiative du Parti Communiste Français, où nous invitons toutes les forces de gauche, les syndicats, les associations, un grand rassemblement national.

 

Rappelez vous le premier meeting à Marseille, en décembre 2004, quand nous disions « nous allons gagner ! »ça a sourit. Personne ny croyait. Et puis on y est arrivé et si aujourdhui, je vous propose que nous nous fixions comme objectif de bâtir une union populaire, une majorité politique pour changer la vie, porteuse donc dun projet anti-libéral, une démarche politique y compris de la conception du pouvoir radicalement neuve, certains vont sourire et vont dire « Comment le Parti Communiste qui a connu cet affaiblissement a lambition », cest pas le Parti communiste qui a cette ambition, cest ce quont fait les hommes et les femmes qui ont dit non au référendum. Ce non appelle à un tel objectif, quil faut passer à la vitesse supérieure. Ce que je vous propose nest pas une alternance, ce nest pas de remettre la gauche au pouvoir, au pouvoir point final , on la fait ça déjà.

Il y a eu des déceptions et la droite est revenue, et lextrême droite toujours plus violente. Ce que je vous propose cest de garder la parole que vous avez pris lannée dernière. De vous saisir du débat politique, de le maîtriser de bout en bout jusquau pouvoir, et daller au bout de vos attentes, vos exigences et de créer les conditions politiques pour que la gauche revienne au pouvoir sur la base dun tel rassemblement, dune telle union populaire, sur des contenus audacieux, courageux, et que la gauche soit durable non pas comme on sort un slogan, mais la gauche elle sera durable parce quelle répondra aux attentes et quelle sera portée par un élan populaire, cest à cela que je vous propose que nous travaillions tous ensemble.

 

Bien sûr, comme dhabitude, on va nous traiter de doux rêveurs, dutopistes, nous appeler à un peu plus de responsabilités, à être réalistes Ce discours, nous lavons tant de fois entendu. « Dans une Europe libérale, avec la mondialisation capitaliste, et avec qui vous allez faire ça ? Comment vous allez faire ? ». Jai envie dire justement parce quil y a cette mondialisation capitaliste, la gauche ne peut pas être a minima. Justement si on veut rompre cette logique capitaliste et libérale, il faut un projet qui soit un projet à gauche qui porte des réformes qui soient en capacité de changer profondément notre société, profondément les règles qui la régissent. Justement, jai envie de dire parce que lon a créé de la déception, de la résignation, du fatalisme, justement il faut que la gauche se décide à faire de la politique autrement et ceux qui construisent le projet et ceux qui ensuite veillent à son application, que ce soit les citoyens et les citoyennes. Nous avons besoin que la gauche se hisse à la hauteur des enjeux daujourdhui. La gauche a besoin de retrouver son sens. Vous savez je regarde comme vous lactualité, ces dernières heures nous allons avoir un  week end chargé, à Gauche, jai envie de dire à tous ceux et celles qui participent à ces rencontres à gauche tout ce week end, les hommes et les femmes qui ont porté le « non » de la victoire, ils nattendent pas des forces de gauche égocentrées sur leurs problèmes internes, ils nattendent pas des forces de gauche quelles se donnent des bons ou des mauvais points dune université à lautre, non ! Ils nattendent pas quon leur fasse choisir entre une alternance faible et une opposition pure et dure. On a déjà connu ça, une opposition pure et dure qui regarde de loin les partis de « gouvernement ». Ces deux facettes, ont mené la gauche à  léchec, La gauche na pas été capable de changer vos vies. Donc cest toute la gauche qui doit aujourdhui être interpellée et débattre ensemble pour répondre à ce problème. Il faut que chaque force à gauche se dépasse, pour être acteur, actrice, de ce rassemblement dont vous voulez, dont vous avez besoin, de ce projet politique que vous voulez, dont vous avez besoin. Ce nest pas chacun chez soi, ni chacun pour soi, à la vision des futures élections et échéances électorales, toute la gauche doit se dépasser pour servir notre peuple, pour lutter devant ce ravage libéral et faire en sorte quenfin les choses bougent.

 

Il faut que la gauche soit capable de se bouger plus quelle ne la fait, bien sûr il y a des différences à gauche, qui le nierait ! Il y a deux choix possibles face à ce paysage à gauche. Soit on prend la photo, on compte ses troupes de chaque coté, soit on se dit « on ne va pas en rester là ». Cest toute la gauche qui doit  venir sur une base de transformation sociale et les meilleurs moyens de ly entraîner, cest que notre peuple lexige, que notre peuple se manifeste et il faut durgence permettre à notre peuple dexprimer cette exigence. Comment ? Pas en senfermant dans des rencontre au sommet, elles sont nécessaires, il faut discuter entre partis politiques, entre forces organisées, mais ça ne suffira pas, nous avons rencontré des forces avec qui nous avons parlé de calendrier, qui nous ont dit « au mois de mai, on se rencontrera quand on aura chacun élaboré notre programme », mais vous, où êtes vous dans ce schéma là ?

 

Mais ce quil faut, cest immédiatement organiser des rencontres-débats, des forums, où les forces de gauche se confrontent avec les citoyennes, citoyens, les salariés, et posent les questions, les vraies questions.

Si la gauche est au pouvoir demain, quest ce quon fait par rapport au chômage,  la précarité, est-ce que demain on met en place une sécurité demploi et de formation ? Par rapport au pouvoir dachat, est-ce que ce fameux Grenelle des salaires dont tout le monde parle, la gauche sengage à le tenir dans les mois qui suivent sa prise de responsabilité. Quid de laugmentation des fonctionnaires ? Quest ce quon fait par rapport aux allocations pour les chômeurs ? Pour les handicapés ? etc Quels engagements pour la gauche ? Quest-ce quon fait par rapport aux services publics ? Reviendra-t-elle sur le changement de statut dEDF-GDF ? Que fera-t-on par rapport à la nécessité de transferts publics. Cest à toutes ces questions que la gauche doit répondre aujourdhui avec les citoyennes et les citoyens. Est-ce quon remettra en cause les lois sur limmigration, pas simplement les dernières lois, mais celles davant qui ne correspondent pas aux besoins de ces hommes et de ces femmes. Est-ce que la gauche accordera le droit de vote aux résidents étrangers. Est-ce que la gauche modifiera les institutions de notre république ? Est-ce quelle donnera les moyens dune véritable démocratie participative ? Est-ce que la gauche fera en sorte quil y ait une véritable réforme de la fiscalité permettant une redistribution de tout cet argent qui va sentasser dans les dividendes, dans les bourses, les salaires des patrons, etc etcEst-ce que la gauche sengage à une véritable loi sur les droits des salariés pour arrêter les délocalisations, pour arrêter la casse des entreprises ?

 

Cest à tous ces points là que la gauche doit répondre, que la gauche sengage à appliquer le vote des Français du 29 mai concernant lEurope. Est-ce quelle prendra des initiatives en direction de lorganisation mondiale du commerce ? Est-ce quelle prendre des initiatives pour le désarmement ? Cest à toutes ces questions que nous devons répondre et sur lesquelles nous devons débattre aujourdhui.

 

Quelles propositions, quels engagements ?  Cest avec vous tous, partout dans le pays que nous voulons le faire. Le Parti Communiste doit prendre sa place dans ce travail. Il va faire des forums dans chaque ville et nous allons tenir le 26 novembre, une initiative nationale où nous invitons lensemble des forces de gauche, associatives et syndicales, les citoyennes et les citoyens, celles qui ont participé et participent aux collectifs du Non, pour une première étape pour voir où en est lélaboration de ce projet que nous voulons voir appliquer demain.

 

Après le 29 mai, ayons de lambition pour notre peuple, ayons de lambition pour la gauche. Nous voulons être le Parti de la résistance, le Parti du rassemblement, nous voulons être le parti dune gauche qui soit une gauche de transformation sociale et nous allons y contribuer avec les hommes et les femmes qui composent ce Parti, mais aussi tous ceux et toutes celles qui en ce moment nous rejoignent. Et jappelle ceux et celles qui ne lont pas encore fait à venir avec nous pour vivre cette belle aventure.

 

Le Parti Communiste, pour ceux qui sen inquiètent est en bonne santé et nous voulons aller très loin et nous allons faire en sorte, je vous assure quà gauche on ne prenne pas le mauvais chemin. Cette fois-ci, il faut prendre le bon chemin, celui que vous nous avez indiqué le 29 mai.

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