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Législation sociale en matière de transport routier

12 Avr 2005

Jacques Barrot – Vice-Président de la Commission européenne, Commissaire en charge du transport

Parlement européen – session plénière –
Monsieur le Président,

Mesdames et Messieurs les Membres du Parlement,

Puis-je vous rappeler que nous sommes en train de traiter ensemble deux dossiers étroitement liés : le premier concerne les règles relatives au temps de conduite maximum et au temps de pause et de repos minimum des conducteurs professionnels. Le second établit les règles dapplication de la réglementation sociale.

Je voudrais vous rappeler que lobjectif de ces deux propositions est de promouvoir une concurrence loyale entre les transporteurs de toute lUnion européenne, daméliorer la sécurité routière et les conditions de travail des conducteurs professionnels concernés. Lharmonisation sociale européenne dans le transport routier est en marche ; notre discussion daujourdhui est évidemment liée à la législation européenne sur le temps de travail des routiers qui est entrée en vigueur le 23 mars dernier. Cette nouvelle législation garantit que les conducteurs qui opèrent dans un autre pays que le leur doivent respecter une norme minimale européenne. Il faut maintenant compléter cette législation.

Or, lapplication de règles sociales harmonisées est indispensable tant pour le marché intérieur, la sécurité routière que pour garantir un minimum de droits sociaux aux travailleurs du secteur.

Jobserve que malgré les efforts communs, un accord entre le Parlement européen et le Conseil na, à ce stade, pas encore été trouvé. Je peux vous assurer que la Commission est et restera prête à jouer son rôle de facilitateur entre les deux institutions.

Revenant à la substance même, permettez-moi de vous rappeler que les règles actuellement en vigueur ont été mises en place depuis 20 ans. Au cours de cette période, nous avons vu louverture totale du secteur du transport routier à la concurrence dans la Communauté, non seulement en termes dopérations internationales, mais aussi, en partie, au regard du cabotage. LUnion européenne a par ailleurs subi plusieurs vagues délargissements, la plus récente datant dun an seulement. Au sein de lUnion, le transport par route est devenu le mode de transport dominant, avec une concurrence féroce qui conduit les opérateurs à être tentés dignorer les règles sociales de base pour maintenir des niveaux de profit.

Dans un contexte où lEurope est souvent critiquée pour son manque daction dans le domaine social, nous devons tout faire pour aboutir sur un dossier aussi sensible pour les travailleurs du secteur.

Dans ce contexte, Honorables parlementaires, je voudrais vous rappeler les trois principaux objectifs de la Commission lorsquelle a formulé sa proposition relative au temps de conduite et de repos des conducteurs professionnels : simplifier, clarifier et mettre à jour la réglementation.

Cest à la lumière de ce qui précède que jindiquerai la position de la Commission sur les principaux éléments du rapport de M. Markov, dont je salue lanalyse et la pertinence :

Tout dabord simplifier les règles : Si lon cherche à réintroduire des dispositions spéciales, ou une multitude de dérogations et dexemptions, nous allons rendre les règles non seulement complexes mais aussi, en pratique, inapplicables. Il faut donner une image claire, simple et accessible de lEurope aux citoyens.

La plupart des amendements de ce type ne peuvent donc pas être soutenus par la Commission. Un simple exemple de cela est lamendement visant à introduire loption de fractionner le repos quotidien en quatre parties distinctes. Tout à fait indépendamment des doutes sur les bénéfices pour la sécurité routière, cela encouragerait les contrôleurs à ne chercher que lélément principal du repos quotidien et à ignorer les autres.

Ensuite, rendre les règles plus claires pour les opérateurs, les conducteurs et les contrôleurs : Par exemple, la proposition dinclure tous les véhicules utilitaires en dessous de 3,5 tonnes. Deux questions me viennent à lesprit : chaque véhicule utilisé à des fins commerciales doit-il relever de ces règles ? Allons-nous voir des scooters et des camionnettes équipés de tachygraphe et cela est-il techniquement possible ? Cependant, je vois bien le souci du Parlement lorsquil inclut telle disposition, pour éviter les abus dun contournement du seuil des 3,5 tonnes.

Enfin, mettre à jour les règles à la lumière des développements du secteur des transports par route. Je cite deux exemples: Lhomologation de la vitesse maximale des tracteurs agricoles et forestiers est maintenant harmonisée au niveau européen. Cette harmonisation a été prise en compte par le Parlement européen et la Commission peut donc soutenir cet amendement.

Dautre part, nous devons reconnaître que des services publics, tels que les services postaux ou de distribution du gaz et de lélectricité ont considérablement évolué. Je ne vois plus de raison pour les exclure.

Jen arrive maintenant aux dates de lintroduction du tachygraphe numérique. Pour la Commission, les échéances actuelles du 5 mai 2005 pour la carte délivrée par les Etats membres et du 5 août 2005 pour lobligation déquiper tous les nouveaux véhicules dun tachygraphe numérique devraient être maintenues. Il ny a aucune raison objective qui justifie un délai supplémentaire. Tant les fabricants de tachygraphes que les constructeurs automobiles ont déjà considérablement investi. Tous les Etats membres se sont engagés dans la position commune du Conseil pour les dates prévues ci-dessus, et mettent dores et déjà en place des formations pour les contrôleurs. Le glissement des échéances laisserait à la fois les Etats membres et lindustrie dans lincertitude la plus complète. Je dois donc, à ce stade, plaider pour le maintien des dates prévues, ce qui va dans le sens du renforcement de la sécurité juridique.

En ce qui concerne la proposition sur les contrôles, la Commission a pour objectif laugmentation de la qualité et de la quantité des efforts de contrôle à fournir par les Etats membres.

Elle a cherché à développer un système de vérification complète de lensemble de la législation sociale communautaire pour le secteur du transport par route (y inclus le contrôle du temps de travail) ;
Elle a encouragé la promotion de la coordination entre les organes de contrôle à la fois dans et entre les Etats membres ;
Elle a souhaité développer une approche harmonisée des sanctions et une définition commune des infractions graves.
Cest à la lumière de ces objectifs que jindiquerai la position de la Commission sur les propositions damendement du Parlement européen qui mapparaissent, dans lensemble, répondre aux préoccupations de la Commission :

Premièrement, le contrôle de lapplication des règles relatives au temps de travail. La Commission ne peut que soutenir la réintroduction de cet élément dans le texte. Le fait que vous ayez optés pour une approche basée sur le contrôle dans les entreprises me semble une approche logique et efficace.

Deuxièmement, la définition commune de plusieurs infractions graves. La Commission se félicite de la réintroduction par le Parlement de cette disposition dans le texte car elle considère quune approche harmonisée du contrôle nécessite une définition commune de ce que constitue une infraction grave.

Troisièmement, un organisme national de coordination des contrôles à désigner; cet organisme sera chargé de la coordination des contrôles par les Etats membres à la fois au niveau national et au niveau international. Cette disposition telle que prévue par le Parlement est clairement soutenue par la Commission. Un tel organisme ne dicterait pas mais concilierait les vues des différents organes nationaux de contrôle. Ce serait une amélioration par rapport à la position commune du Conseil qui prévoit une stratégie nationale de contrôle et la désignation dun point focal national de contact avec les autres Etats membres.

Puis nous en arrivons aux échéances prévues pour laugmentation par étapes du nombre des contrôles (de 1 % des jours prestés à 3 %). Tout en reconnaissant lobjectif poursuivi par le Parlement et en admettant que lapproche du Conseil manque dambition, la Commission fait appel au réalisme et préfère sassurer que tous les Etats membres se trouvent dans une position qui leur permette de respecter le nombre et la qualité des contrôles requis par la directive. Il en va de la sécurité routière et de la bonne application des règles communautaires.

Enfin, les contrôles routiers. La Commission met en garde contre le caractère trop contraignant des statistiques à collecter par les contrôleurs auprès des chauffeurs. Cette contrainte risquerait dêtre contreproductive car difficile dans la pratique des contrôles au bord des routes.

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les députés, mes services vous transmettront la position détaillée de la Commission sur chaque amendement proposé. Je vais maintenant écouter le débat avec attention et je reste à votre disposition pour déventuelles questions soulevées.

Merci pour votre attention.

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