Lutte contre le VIH : un composé très prometteur
Une molécule capable de bloquer le transfert du VIH d’une cellule à une autre a été mise au point par des chercheurs de l’Institut de biologie structurale Jean-Pierre Ebel (CNRS/Université Joseph Fourier/CEA). Elle agit en saturant un récepteur nommé DC-SIGN, utilisé par le VIH pour se faire transporter dans l’organisme. Cette molécule a fait l’objet d’un dépôt de brevet et d’une publication, qui sortira le 19 mars dans le journal ASC Chemical Biology.
Malgré les nombreux progrès
réalisés dans la lutte contre le VIH, cette infection est toujours
responsable de millions de morts chaque année. La recherche de
nouvelles cibles cellulaires, contre lesquelles diriger de nouveaux
traitements antiviraux, demeure un enjeu important.
Des chercheurs de l’Institut de Biologie Structurale (CNRS /Université
Joseph Fourier/CEA) ont travaillé sur un récepteur, nommé DC-SIGN,
qui se trouve à la surface des cellules dendritiques : ces cellules du
système immunitaire sont présentes dans les zones de contact avec
l’extérieur, comme les épidermes ou les muqueuses, premiers sites de
rencontre avec les pathogènes. Ce récepteur est impliqué dans les
phases initiales de l’infection par le VIH. Il représente une cible
thérapeutique potentielle qui n’a pas encore été exploitée jusqu’ici.
Quel est le rôle de DC-SIGN ? En temps normal, il capture des
pathogènes par la reconnaissance de certains oligosaccharides
caractéristiques présents à leur surface. Ces pathogènes sont ensuite
internalisés dans les cellules dendritiques qui les dégradent et
présentent les morceaux à leur surface. Ces cellules vont ensuite se
déplacer jusqu’aux organes lymphoïdes pour déclencher une réponse
immunitaire de l’organisme, c’est-à-dire la production de lymphocytes T
capables de combattre ce pathogène. Le VIH, lui, utilise DC-SIGN pour
se faire transporter intact jusqu’aux lymphocytes T qu’il va infecter.
Il s’attaque en particulier aux lymphocytes T CD4+ (lymphocytes
porteurs d’une molécule nommée CD4 et sensible au VIH), qui sont la
cible principale utilisée par le virus pour son expansion.
Les chercheurs ont mis au point un composé capable d’inhiber le
processus de transfert du VIH aux lymphocytes T CD4+. Cette molécule
tétravalente, qui possède quatre groupes fonctionnels imitant les
oligosaccharides des pathogènes, est reconnue par DC-SIGN, empêchant
ainsi le VIH d’utiliser ce récepteur pour voyager jusqu’aux organes
lymphoïdes. Elle présente des propriétés particulièrement
intéressantes, une haute solubilité dans les milieux physiologiques,
une cytotoxicité négligeable et d’un effet longue-durée (même après
lavage des cellules, l’effet bloquant perdure plusieurs heures). En
outre, la structure simple du composé permet d’envisager facilement une
production à grande échelle.
Enfin, dernier avantage mais non le moindre, DC-SIGN est également
utilisé par d’autres pathogènes pour contourner le système immunitaire.
Le composé mis au point par les chercheurs pourrait également présenter
des débouchés dans l’inhibition de l’infection par les virus de
l’hépatite C, de la dengue, Ebola, du SRAS(3), la bactérie
Mycobacterium tuberculosis (responsable de la tuberculose) et un
certain nombre de parasites. Il pourrait même s’avérer plus efficace
que dans le cas du VIH. Ce composé pourrait ainsi rejoindre la liste
des molécules antivirales conçues sur la base de structures osidiques
existant dans la nature, les glycomimétiques, tel le Tamiflu utilisé
contre la grippe saisonnière.
Son efficacité est avérée in vitro pour empêcher le transfert du VIH
d’une cellule à une autre. Les chercheurs ont pris soin de protéger
leur molécule, par un brevet déposé par le CNRS et l’Université Joseph
Fourrier. Prochaine étape : les études précliniques menées sur des
modèles animaux. En attendant de trouver un partenaire ou de créer
eux-mêmes une structure capable de prendre cet aspect en charge, les
chercheurs continuent d’améliorer l’efficacité de leur molécule pour la
rendre plus spécifique de DC-SIGN et augmenter son interaction avec ce
récepteur.
Contacts :
Chercheur l Franck Fieschi l T 04 38 78 91 77 l [email protected]
Presse CNRS l Claire Le Poulennec l T 01 44 96 49 88 l [email protected]
Presse CEA l Stéphane Lavaessierre l T 01 64 50 27 53 l [email protected]
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