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« Prend tes précautions, mon petit»

31 Juil 2006

Face à des pressions émanant de différentes sources, nos gouvernants sont désormais condamnés à penser à tout, dans lintérêt de tous les citoyens. Quils se complaisent ou soient contraints par cette mission, la loi -ou le règlement- enjoint à tout un chacun « de ne plus prendre de risque ». La politique du parapluie bat son plein. Les bretelles, le rempart en béton et les protections en caoutchouc sont en plein essor. Est-ce que ce sont vraiment et toujours les seuls intérêts du citoyen quil y a lieu de protéger ? Sans aucun doute, dans un certain nombre de cas. On peut affirmer également que cest aussi et surtout pour dégager leur responsabilité civile et pénale que les dirigeants de toutes sortes développent un interventionnisme outrancier. Et cest là que le bât blesse.

A tout bout de champ et sous tout prétexte, le principe de précaution doit être mis en place. Peu importe que son application génère des situations cocasses ou des recommandations ridicules. Il y a lieu de stocker dés maintenant des millions de masques et de médicaments dont on ne connaît pas bien les effets pour lutter contre une éventuelle épidémie de grippe aviaire. Tant pis, si les dates de péremption seront dépassées au moment où lon en aura besoin ou si le volume des commandes est inadapté. Limportant consiste à éviter une éventuelle accusation. Même si le risque nest pas patent. Cest la définition du principe arrêté lors de la conférence de Rio en 1992 qui est généralement retenu. On a prévu un immense parapluie qui permet de justifier que « Des mesures [ soient ] prises lorsquil existe des raisons suffisantes de croire quune activité ou un produit risque de causer des dommages graves et irréversibles à la santé ou à lenvironnement. Ces mesures peuvent consister, s’il s’agit d’une activité, à réduire ou à mettre un terme à cette activité ou, s’il s’agit d’un produit, à interdire ce produit, même si la preuve formelle dun lien de cause à effet entre cette activité ou ce produit et les conséquences redoutées na pu être établie de manière irréfutable. Tout le monde en rang et fermez le ban.

De plus à chaque instant, les médias aidant « on nous fout la trouille » pour tout ce que lon voudrait envisager, faire ou entreprendre. Nous sommes passés en quelques années dune époque où il était recommandé de « marcher dans les clous » à lère des invectives stupides. Les panneaux autoroutiers sont significatifs de cette affirmation lorsquils indiquent, « lors de la canicule, hydratez-vous ». Cest à croire que tous les citoyens ou en tout cas un grand nombre sont atteints de schizophrénie. Ils sont – cest écrit – incapables de voir la réalité en face !

Quelles sont les principales conséquences de cette attitude étatique qui devient de plus en plus « une grande Maman » quil faut absolument écouter ? Lindividu, privé de liberté devient de plus incapable de faire appel à la logique, aux enseignements reçus, à lexpérience. Certes il y a lieu de prévenir un enfant que « jouer avec des allumettes peut-être dangereux » mais de grâce, évitons de dépasser les limites de lacceptable. A défaut, le citoyen dont lhorizon est assombri par une multitude de règles, ny comprendra plus rien. Au point quil vivra dans lattentisme. Cette triste fête, dont seuls quelques privilégiés sauront bénéficier, est en train de commencer. Quand il fait chaud « vous devez vous occuper de vos proches » disent les affiches. A quand de nouvelles instructions pour rappeler les obligations quil faudra impérativement respecter pour la fête des mères ? Plus rien narrête le principe de la non responsabilité lorsque les notices des médicaments stipulent « ne prenez pas une double dose si vous navez pas avalé votre pilule la veille ». Idem pour le mode demploi de votre mixeur qui précise que les parties électriques ne doivent pas être mises sous le robinet surtout si lappareil est sous tension !

Nos grands-mères avaient raison. Elles obéissaient à des règles de prudence. Elles disaient aux enfants, voire aux adultes « Prend tes précautions, mon petit ». Cela voulait dire quil fallait prévoir daller libérer sa vessie avant une épreuve scolaire, ou pour tout événement important de la vie quotidienne.

La recommandation était simple, logique, pleine de bon sens. Des règles quil faudrait remettre au goût du jour car la prudence raisonnée sera toujours mieux adaptée à la vie en Société que des mesures de prévention exagérées, nuisibles à linitiative individuelle. Certains hommes ne peuvent avoir la prétention de tout prévoir pour tous les autres. Sauf à vouloir scléroser les rouages habituels du bon fonctionnement social. Gérard Gorrias

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