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Un trésor paléoclimatique est dévoilé par des scientifiques dans le cadre du programme IODP

08 Mar 2006

Mercredi 8 Mars 2006 – communiqué de presse. Un échantillonnage de coraux fossiles d’une exceptionnelle qualité, foré au large de Tahiti, va permettre de reconstituer l’histoire du changement climatique.

Une équipe internationale  de scientifiques, s’est réunie à l’université de Brême pour analyser un échantillonnage de coraux fossiles forés dans les eaux de Tahiti en octobre et novembre 2005, dans le cadre du programme IODP (Integrated Ocean Drilling Program). Depuis la mi-février 2006, l’équipe dirigée par deux co-chefs de mission, un français et un japonais, a commencé l’étude des 632 mètres de carottes prélevés dans 37 puits de forage. Les premières conclusions de cette étude qui va durer plusieurs années, indiquent que cet échantillonnage contient les renseignements les plus précis actuellement disponibles sur les variations du niveau marin et de la température des eaux de surface au cours de la dernière déglaciation dans l’océan Pacifique Sud.

Le co-chef de mission Gilbert Camoin, du CNRS-CEREGE (Centre Européen de Recherche et d’Enseignement en Géosciences de L’Environnement) à Aix-en-Provence, résume la réussite de l’expédition : Tahiti nous a livré un véritable trésor paléoclimatique, des archives sur les changements du niveau de la mer sur une période couvrant environ les 20 000 dernières années. Les coraux étant des enregistreurs privilégiés des conditions environnementales, nous avons pu, en décrivant les carottes continues de roches récifales, obtenir des informations précises sur la croissance du récif au moment où le niveau de la mer est monté après le dernier maximum glaciaire, 23 000 ans avant nos jours.

M. Camoin explique que Tahiti a été choisie en raison de sa situation et de sa géologie : c’est une île volcanique relativement stable, qui ne s’enfonce qu’à la vitesse de 0,025 mm par an, et est située dans le Pacifique Sud, donc loin des zones autrefois recouvertes par les glaces, ce qui permet de reconstituer avec une grande précision les variations du niveau marin, induites par la fonte des calottes polaires après le dernier âge glaciaire.

Le co-chef de mission japonais Yasufumi Iryu, de l’université de Tokohu, ne tarit pas d’éloges sur la qualité des échantillons obtenus. La carotte continue de corail massif la plus longue que nous avons récupérée, mesure 3,5 m et représente 350 ans de croissance corallienne. Ces coraux massifs ne constituent que 5% de l’échantillonnage total, mais leur qualité est inestimable car ils fournissent des archives continues sur la variabilité du climat et permettent de reconstituer la fréquence et l’ampleur dans le passé des anomalies climatiques telles que El Niño.

Nous avons atteint notre objectif, celui d’acquérir des archives paléoclimatiques de haute résolution, déclare M. Camoin. Les coraux massifs que nous avons récupérés à des profondeurs d’eau de 40 à 120 mètres, présentent des bandes de croissance constituées de couplets de niveaux clairs et foncés, d’un centimètre d’épaisseur en moyenne, qui représentent chacun une année de croissance. Par ailleurs, en utilisant des méthodes radiométriques, nous pouvons dater l’âge d’un corail fossile à 30 ans près et donc replacer la croissance de ces coraux sur une échelle de temps extrêmement précise, ajoute M. Camoin.

M. Iryu, spécialiste des anomalies climatiques El Niño, souligne que les informations sur le niveau de la mer et l’âge, archivées dans les carottes de corail, sont cruciales. Il ajoute, Nous avons découvert des microbes vivants (bactéries) dans les cavités des récifs fossiles. Ces échantillons ont été prélevés et congelés en vue d’un séquençage de l’ADN.

Les récifs coralliens constituent l’écosystème le plus riche sur Terre, mais aussi le plus fragile, déclare M. Camoin. Le volume des récifs coralliens diminuant, la moitié d’entre eux devrait disparaître au cours des prochaines décennies. Les récifs coralliens jouent un rôle important dans les bilans globaux, affirme M. Camoin.

L’expédition IODP 310 a été conduite par ECORD (European Consortium for Ocean Research Drilling) et mise en uvre par ESO (ECORD Science Operator), l’un des trois opérateurs du programme specialisé dans l’opération des plate-formes spécifiques. La liste des participants ainsi que leurs coordonnées sont disponibles sur le site internet : http://www.ecord.org/exp/tahiti/310.html.

IODP est un programme de recherche océanique international dont l’objectif est le progrès de la connaissance scientifique de la Terre grâce à l’échantillonnage et à la surveillance des fonds marins. Les Etats-Unis (National Science Foundation- NSF) et le Japon (Ministry of Science, Education, Culture, Sports and Technology- MEXT) sont les principaux partenaires du programme. ECORD représente 17 pays et participe à IODP comme membre contributeur.

Contact(s) :
Gilbert CAMOIN, CEREGE CNRS UMR 6635, Tél : 04-42-97-15-14
Catherine Mével, ECORD Managing Agency et IPGP, Laboratoire de Géosciences Marines, Tél : 01 44 27 51 93

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