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CNRS : Une « aurore boréale » détectée sur Mars

11 Juin 2005

Une équipe internationale, conduite par un chercheur du CNRS (1), vient pour la première fois de détecter l’équivalent d’une aurore boréale sur Mars, mais pas au-dessus d’un pôle. Le spectromètre SPICAM, embarqué à bord de la sonde Mars Express, l’a localisée dans la nuit martienne : elle occupe une région de 30 kilomètres de diamètre, correspondant à une zone de champ magnétique fossilisé déjà révélée par la sonde Mars Global Surveyor de la NASA. Ces travaux sont publiés dans la revue Nature du 9 juin 2005.

Les aurores polaires sont dues à l’interaction de particules électriquement chargées (électrons, protons, ions provenant du Soleil) avec la haute atmosphère. Ces particules sont guidées par les lignes de force du champ magnétique terrestre et, en entrant dans l’atmosphère, elles excitent les molécules qui la composent. Ces dernières se désexcitent en émettant de la lumière, produisant le magnifique spectacle des aurores boréales et australes.

Des aurores polaires ont déjà été détectées sur Jupiter, Saturne, Uranus et Neptune, qui sont dotées de champs magnétiques. Des aurores ont également été détectées sur Vénus, dépourvue de champ magnétique : elles se répartissent alors sur tout le disque de la planète. Comme Venus, Mars ne possède pas de champ magnétique global, mais la sonde Mars Global Surveyor (MGS) de la NASA a mis en évidence un champ magnétique fossile ou « rémanent », localisé dans certaines régions de la surface martienne.

C’est avec le spectromètre SPICAM (2), embarqué sur la sonde Mars Express de l’ESA, que les chercheurs ont découvert l’aurore martienne. L’instrument a détecté des raies de lumière ultraviolette caractéristiques de la désexcitation du monoxyde de carbone et de l’atome d’oxygène. Ces espèces proviennent de l’interaction d’un flux de particules chargées (probablement des électrons) avec les molécules de dioxyde de carbone, constituant principal de l’atmosphère martienne. Cette aurore a été découverte du côté nuit. Du côté jour, elle aurait été invisible, car noyée dans les émissions dues à l’interaction des rayons du Soleil avec l’atmosphère.

La zone d’émission mesure 30 kilomètres de diamètre. Elle se situe à une altitude de 130 kilomètres (ces particules chargées, arrêtées par l’atmosphère, ne parviennent pas jusqu’à la surface). Les chercheurs ont comparé leurs résultats avec les données de la sonde Mars Global Surveyor, qui a effectué la cartographie magnétique de la surface de Mars : la zone d’émission enregistrée par SPICAM correspond à la zone où le champ magnétique rémanent de Mars est le plus intense. Cette correspondance confirme que les émissions sont dues à un flux d’électrons, qui se précipitent le long des lignes de force du champ magnétique et qui interagissent avec l’atmosphère.

Cette observation montre pour la première fois l’importance du champ magnétique rémanent de Mars, qui concentre le flux d’électrons provenant du Soleil (par un chemin qui reste mal compris) dans de petites régions de l’atmosphère martienne, entraînant des aurores locales. Les particules créent sans doute aussi une ionosphère (elles arrachent des électrons aux molécules de l’atmosphère) en pleine nuit, alors qu’en principe celle-ci n’existe que du côté jour sous l’action du Soleil. L’hypothèse de l’ionosphère sera bientôt testée grâce au radar Marsis, embarqué à bord de la sonde Mars Express, qui devrait entrer en fonctionnement cet été.

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Cartographie du champ magnétique martien réalisée par Mars Global Surveyor (le code de couleur représente la composante radiale du champ, en nanoteslas), avec les indications des observations faites par SPICAM à bord de Mars Express. La ligne en pointillés blancs représente l’orbite qui a permis la détection de l’aurore. Le trait en pointillés mauves est la ligne de visée sur laquelle l’aurore a été détectée. Cette aurore se situe dans le petit rectangle noir, qui correspond parfaitement à la zone où le champ magnétique rémanent de Mars est le plus intense.
© Nature

Notes :
(1) du Service d’Aéronomie (CNRS/Université Paris VI/Université de Versailles), Verrières-le-Buisson.
(2) SPICAM (Spectroscopy for the investigation of the characteristics of the atmosphere of Mars) a été construit au service d’aéronomie, en collaboration avec le Space Research Institute de Moscou et l’Institut belge pour l’aéronomie spatiale de Bruxelles. Il comporte un spectromètre ultraviolet et infrarouge, et c’est avec la voie UV que les mesures ont été faites.

Références :
Discovery of an aurora on Mars, Jean-Loup Bertaux, François Leblanc, Olivier Witasse, Eric Quemerais, Jean Lilensten, S. A. Stern, B. Sandel, Oleg Korablev, Nature, Vol 435, 9 Juin 2005.

Contacts :
Contact chercheurs :
Jean-Loup Bertaux, Tél : 01 69 20 31 16 ou 06 80 73 08 70, Mél : [email protected]
François Leblanc, Tél : 01 64 47 43 03 -Mél. : [email protected]

Contact presse CNRS :
Claire Le Poulennec, Tél : 01 44 96 49 88, Mél : [email protected]

Contact INSU-SDU :
Philippe Chauvin, Tél : 01 44 96 43 36, Mél : [email protected]

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