Le prix européen Descartes récompense l’équipe de l’observatoire H.E.S.S. pour ses avancées en astronomie gamma de très haute énergie
L’observatoire franco-allemand des rayons gamma (photons) de très haute énergie H.E.S.S. a reçu le 7 mars le prix Descartes 2007. Depuis 2000, ce prix récompense des équipes de scientifiques pour les résultats de travaux de recherche transnationaux. Il leur a été attribué pour la qualité de leurs résultats sur « l’univers non-thermique » ou « univers violent » permettant d’établir un nouveau domaine de l’astronomie. L’observatoire a été construit principalement par des laboratoires français et allemands auxquels se sont jointes des équipes d’autres pays européens et de l’Afrique australe. En France, il associe des laboratoires du CNRS (IN2P3 et INSU)(1) et du CEA (Dapnia(2)).
H.E.S.S. (High Energy Stereoscopic System) désigne un ensemble de quatre télescopes installés en Namibie sur le plateau de Gamsberg. H.E.S.S. est consacré surtout à l’observation du ciel austral qui donne accès à la plus grande partie de la Voie Lactée.
En détectant les rayons gamma de très haute énergie grâce aux éclairs lumineux qu’ils produisent en interagissant avec l’atmosphère terrestre (« effet Tcherenkov »), H.E.S.S. apporte des informations précieuses sur des phénomènes parmi les plus violents de l’Univers. Sa construction est le produit « évolutif » de deux concepts de télescope : le premier, élaboré par les équipes du CEA et du CNRS, est basé sur une caméra à très haute définition et sur son électronique rapide ; le second, mis en uvre par les équipes de l’Institut Max Planck, repose sur la stéréoscopie, c’est-à-dire l’utilisation simultanée des quatre télescopes permettant d’obtenir des images en trois dimensions.
Les résultats de l’observatoire H.E.S.S sont salués par le Prix Descartes comme des grandes premières en astronomie gamma :
· Première image en rayons gamma d’un vestige de supernova. Dans notre Galaxie, les explosions d’étoiles sous forme de supernovæ produisent des ondes de choc qui balayent le milieu interstellaire pendant des milliers d’années. Les rayons gamma sont alors émis par des particules accélérées dans l’onde de choc de l’explosion. Ce résultat(3) a permis de progresser vers la solution du mystère de l’origine des rayons cosmiques ;
· Première cartographie systématique à ces énergies de la région centrale de notre Galaxie(4) qui a multiplié par dix le nombre de sources connues de rayons gamma ;
· Etude détaillée du rayonnement de très haute énergie en provenance du voisinage du trou noir au centre de notre Galaxie(5) ;
· Découverte d’un rayonnement diffus(6), vraisemblablement dû aux interactions des rayons cosmiques dans les nuages moléculaires ; ces particules pourraient avoir été accélérées par l’onde de choc d’une supernova qui a explosé il y a 100.000 ans près du centre de notre Galaxie ;
· Découverte de l’émission gamma d’un système binaire abritant un trou noir stellaire ou une étoile à neutrons ; cette émission varie avec une périodicité de l’ordre de quatre jours(7), ce qui en fait la première « horloge cosmique » à ces énergies ;
· Découverte d’un rayonnement en provenance du centre d’une galaxie proche (M87), indiquant par sa variabilité rapide qu’on sonde le voisinage immédiat ou l’horizon d’un trou noir(8) ;
· Découverte de plusieurs noyaux actifs de galaxie à des distances cosmologiques, démontrant que l’Univers est beaucoup plus transparent aux rayons gamma que ce qu’on croyait jusqu’alors(9).
L’expérience H.E.S.S. sera bientôt complétée par un très grand télescope de 28 mètres de diamètre au centre du réseau des 4 instruments actuels. Cette nouvelle phase de l’expérience permettra à la fois d’améliorer la sensibilité et de permettre un recouvrement avec la gamme d’énergie couverte par le satellite d’astronomie gamma GLAST de la NASA, qui doit être lancé en 2007. Les équipes de H.E.S.S. sont également partie prenante dans un projet de grand réseau de télescopes Tcherenkov, en collaboration avec d’autres équipes travaillant dans le même domaine ; ce projet, nommé « TCherenkov Telescope Array » ou CTA, permettra de multiplier par 10 la sensibilité et d’accroître considérablement les sources d’information.
Notes :
1) LLR École polytechnique (IN2P3/CNRS), LPNHE des Universités Paris VI et VII (IN2P3/CNRS), APC (IN2P3/CNRS/Université Paris 7/CEA), GAM Université de Montpellier 2 (IN2P3/CNRS), LAPP Annecy le Vieux (IN2P3/CNRS), CESR Toulouse (INSU/CNRS), LAOG Grenoble (INSU/CNRS), LUTH Observatoire de Paris-Meudon (INSU/CNRS).
2) DAPNIA, Laboratoire de recherche sur les lois fondamentales de l’Univers de la Direction des Sciences de la matière (CEA/DSM).
3)High energy particle acceleration in the shell of a supernova remnant. Nature 432 (2004) 75-77
4)A new population of very high energy gamma-ray sources in the Milky Way. Science 307 (2005) 1938-1942
5)Very high energy gamma rays from the direction of Sagittarius A* Astron. Astrophys. 425 (2004) L13-L17 et H.E.S.S. observations of the Galactic Center region and their possible dark matter interpretation. Phys. Rev. Lett. 97 (2006) 221102
6)Discovery of very-high-energy gamma-rays from the Galactic Centre ridge. Nature 439 (2006) 695-698
7)Discovery of very high energy gamma rays associated with an X-ray binary Science 309 (2005) 746-749.
8)Fast variability of Tera-electron Volt gamma-rays from the radio galaxy M87 Science 314 (2006) 1424 1427
9)A low level of extragalactic background light as revealed by gamma-rays from blazars Nature 440 (2006) 1018-1021.
Références :
Rayons gamma : Le rayonnement gamma est constitué de photons, comme la lumière visible ou le rayonnement X, mais il est beaucoup plus énergétique. La lumière visible a une énergie de l’ordre de un électron-volt (1 eV). Les rayons X ont une énergie de mille à un million d’eV. H.E.S.S détecte des rayons gamma de très haute énergie, atteignant un million de millions d’eV (Tera-électron-volt). Ces gammas de très haute énergie sont peu nombreux : même pour une source astrophysique relativement intense, le flux de photons gamma pénétrant dans l’atmosphère est d’environ un par mois et par mètre-carré.
Contacts : |
Chercheur : Michael Punch : 01 52 27 60 81 [email protected] Bernard Degrange : 01 69 33 31 05 Stavros Katsanevas : 01 44 96 47 57 Jean-Pierre Lasota : 01 44 32 80 80 Communication : Philippe Chauvin : 01 44 96 43 36 Presse : Cécile Pérol : 01 44 96 43 09 |
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